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Femmes et pouvoir?

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« On se construit comme femme en se disant que le pouvoir à la maison, c’est légitime. Au boulot non, c’est aux hommes ! »

  • « Le pouvoir à la maison c’est ce que les hommes ont laissé aux femmes. Et c’est des choses qu’on fait pour que ça aille bien, que tout le monde s’entende, qu’il y ait une harmonie, un frigo plein. Donc le pouvoir féminin c’est positif, alors que du côté homme c’est négatif ! »
  • Pour moi le pouvoir n’existe que par rapport aux autres et il est régi par des rapports de force. Donc c’est un vocabulaire guerrier, plus masculin.
  • Ce thème m’a choqué. Les femmes, on ne veut pas prendre le pouvoir, on se différencie des hommes par le devoir. Le pouvoir c’est négatif.

Ainsi se sont exprimées les femmes venues travailler avec nous sur ce thème. « Parmi les stéréotypes persistants, le rapport des femmes au pouvoir est à interpeller en premier », écrivait Viviane de Beaufort dans un rapport publié en 2012 « Femmes et pouvoir : tabou ou nouveau modèle de gouvernance ? ». Nous attendions les problèmes de confiance en soi ou l’expression d’un tabou. Ces questions  sont présentes…

  •  La compétition, on l’accepte, mais le pouvoir reste un tabou.
  • Quand j’étais petite j’aimais le pouvoir. Mais j’ai pris tellement de claques ! J’étais un majordome, un dictateur, c’est très mal vu…
  • Je voudrais pouvoir dire « J’ai de l’ambition ! »…

… mais à côté de ce malaise à aborder franchement la question du pouvoir, nous avons aussi beaucoup entendu la remise en cause du pouvoir tel qu’il s’exerce actuellement en entreprise, et majoritairement par les hommes :

  • Je voudrais savoir comment on peut exercer le pouvoir différemment des hommes. Dans le travail, le pouvoir j’en ai une vision très négative avec les hommes. Je ne m’y reconnais pas. C’est des chiffres, c’est violent, c’est déshumanisé. Je suis ambitieuse, mais ça ne me donne plus envie…

Toutefois d’autres femmes dans cet atelier sont venues témoigner de leur exercice du pouvoir, du plaisir qu’elles ont pu y trouver et du sentiment de liberté ou de réalisation qui l’accompagne:

  • Mon pouvoir, c’est de faire progresser les autres. Le pouvoir c’est aussi celui de se réaliser, de faire les choses.
  • J’aime le pouvoir que j’ai acquis au fil de ma carrière, car j’ai le sentiment qu’il me permet de faire avancer les choses dans le bon sens et qu’il me donne une légitimité dans mes actions au quotidien.
  • Le pouvoir, c’est la liberté de faire les choses, de ne pas compromettre ses valeurs. Actuellement je brave les arbitraires, je rencontre beaucoup de « non », mais si on creuse, si on insiste, ça arrive quand même. Et je suis perçue par les autres comme ayant beaucoup de pouvoir. Le pouvoir de faire ce qu’on pense bénéfique.
  • J’ai pris le pouvoir dans ma vie, c’est-à-dire avoir suffisamment d’influence pour que les décisions soient prises en conformité avec mes choix, mes valeurs. C’est du plaisir de voir qu’on influence la société. J’ai une image moins négative du pouvoir, car on peut l’exercer autrement.

Ces femmes ont aussi parlé du poids qui a pesé sur elles, de la contrainte qu’exerçait cette impression d’avoir un rôle à jouer, de codes à adopter, de la nécessité d’alterner les postes avec management et sans management pour se ressourcer.

Les interrogations dans l’atelier ont donc vite tourné autour de « qu’est-ce que serait un pouvoir sain ? ». Cette question n’est pas «genrée ». Ce qui le serait est cette propension des femmes à se poser des questions que l’on dit souvent « inutiles ». Un DRH interrogé nous a dit « Que les femmes gardent leurs questions qui sont légitimes, mais que pendant le match elles y soient à fond ! » :

  • Effectivement, se poser la question de ses compétences, c’est adapté et pertinent si on se demande comment les acquérir, plutôt que d’en rester au constat de ce qui fait défaut ou de partir dans un bluff anxiogène.
  • Se poser la question d’un pouvoir « sain », quelle bonne idée à l’heure du burn-out et des risques psychosociaux en entreprise!

Gardons donc nos questions, mais transformons-les en questions « utiles ». Ne faudrait-il pas pour cela sortir du schéma de la bonne élève qui attend des rôles modèles parfaites pour lui tracer la voie ? Accepter l’imperfection, renoncer à l’idéalisation du leadership au féminin que l’on ne voit jamais arriver, mais garder cette tendance introspective que les femmes ont héritée du passé ? Que les femmes fassent de leurs questions une force et non un frein !

Voici la réflexion que nous leur proposerons le 10 mars avec des outils pratiques, concrets, utilisables au quotidien :

  • Quels sont les différents types de pouvoir ? A quelles situations répondent-ils ?
  • Doit-on tenir compte des codes du pouvoir pour y accéder ?
  • Qu’est-ce que c’est qu’un pouvoir « sain » ? Quelles en sont les conditions organisationnelles ? Managériales ? Comment l’exerce-t-on ?
  • Quelles pratiques, quelles stratégies construire pour le mettre en place et ne pas s’épuiser en l’exerçant?

Puis Zahia Ziouani, une femme cheffe d’orchestre qui a pris le pouvoir sur sa vie en créant très jeune son orchestre pour faire ses propres choix musicaux (sans attendre les offres qu’on ne lui fera pas), qui a instauré la parité parmi ses musiciens et créé des passerelles entre les cultures et les milieux sociaux, viendra en Grand Témoin, apporter un éclairage personnel à la journée en venant présenter son parcours et son expérience.